À Téhéran, l’argent ne vaut plus. Il fond. Il se dissout. Lundi 29 décembre 2025, le rial s’effondre, Téhéran proteste, dollar à 1,38–1,39 million de rials.
Quand une monnaie casse, ce n’est pas seulement un graphique qui saigne
Dans rues et bazars, c’est brutal : si le rial glisse, chaque salaire devient un pari perdant. Associated Press décrit des rassemblements de commerçants et traders à Téhéran et ailleurs, dispersés parfois violemment.
Derrière la colère, il y a l’arithmétique du quotidien. Inflation 42%, rial en chute de 40% : le quotidien étouffe, les prix dépassent les salaires. Dans ce contexte, beaucoup cherchent une porte de sortie et retombent sur la même idée : convertir une partie de l’épargne en un actif rare et difficile à manipuler, comme on le ferait avec l’or. C’est exactement la logique derrière le statut d’or numérique du BTC en 2026 : quand la monnaie locale fond, la priorité n’est plus de « gagner », mais de ne pas se faire effacer.
Puis, comme souvent dans les crises monétaires, la politique s’invite. Le gouverneur de la banque centrale, Mohammad Reza Farzin, a remis sa démission, en attente d’approbation présidentielle selon Reuters. Quand le pilote quitte le cockpit en plein trou d’air, le marché n’appuie pas sur pause.
Bitcoin comme bouclier individuel, pas comme slogan
C’est dans ce genre de séquence que le mot Bitcoin sort du cercle des initiés. Hunter Horsley, Bitwise, l’a formulé sans poésie : face à la mauvaise gestion économique, Bitcoin devient une manière pour les gens de se protéger. Ce n’est pas un appel romantique à la révolution, c’est une réaction de survie financière.
Techniquement, l’argument tient en deux gestes : convertir une partie de l’épargne en un actif rare, puis le conserver sans dépendre d’une banque locale. Quand l’accès au dollar se rétrécit, quand l’épargne en monnaie nationale s’évapore, la promesse de Bitcoin, transférable, fractionnable, détenu en propre, prend une teinte très concrète.
Mais le réel mord. Le trading crypto est permis en Iran, pourtant les règles autour de la conservation en propre et l’environnement réglementaire restent flous, tandis que le minage est fortement encadré. Cette volonté de cadrer l’activité n’a rien d’exceptionnel : partout, les États cherchent à contrôler l’accès à l’énergie, les infrastructures et les flux. Ajoutez à cela un État qui surveille, des rampes d’accès limitées, et une volatilité qui peut frapper au pire moment : Bitcoin peut protéger, oui, mais il ne fait pas disparaître les contraintes d’un pays sous pression.
Banques fragiles, sanctions, hacks : le cocktail qui pousse vers le hors système
L’autre carburant de la défiance, c’est la solidité perçue du système bancaire. Reuters rappelle le poids des sanctions et l’asphyxie en devises qui va avec, tandis que les autorités ont averti que plusieurs banques risquaient dissolution ou fusion sans réformes. Dans ce décor, l’épargnant devient naturellement allergique au guichet.
Même le levier classique d’un pays énergétiquement avantageux, miner du bitcoin, se heurte à la réalité politique. Des acteurs du secteur ont rappelé la répression du minage non enregistré, avec des incitations à dénoncer, alors même que la demande de réserves de valeur explose. On comprend le paradoxe : l’électricité peut être bon marché, mais le risque, lui, coûte cher.
Et quand les gens tentent la porte crypto, une autre peur arrive : la sécurité. En juin 2025, l’exchange iranien Nobitex a été visé dans une attaque majeure, avec des montants rapportés autour de 81 à 90 millions de dollars selon les sources. Dans une économie fragile, un hack n’est pas un incident, c’est une saignée supplémentaire. Résultat : Bitcoin redevient désirable, mais la manière d’y accéder et de le garder devient tout aussi cruciale que l’actif lui-même.
