ADI Chain vient de signer un protocole d’accord avec M-PESA Africa. L’idée consiste à brancher une infrastructure blockchain “institutionnelle” sur l’un des réseaux de mobile money les plus massifs du continent. L’annonce arrive juste après une série de partenariats annoncés par la fondation qui pilote le projet.
M Pesa comme rampe d’accès, pas comme gadget
M Pesa n’a pas besoin d’être “tokenisé” pour être utile. Il est déjà le réflexe de paiement de dizaines de millions de personnes. Sur son propre site, M-PESA Africa parle de plus de 60 millions de clients chaque mois, répartis sur huit pays, avec un vaste tissu de marchands et d’entreprises.
C’est précisément cette densité qui intéresse ADI. Une blockchain peut être élégante sur le papier et rester invisible dans la vraie vie. Avec M Pesa, le “dernier kilomètre” existe déjà. Les usages sont là. Les habitudes aussi. Il reste surtout à raccorder des services numériques qui tiennent la route.
Dans ce schéma, la promesse implicite est de faire passer des paiements et des actifs numériques par des rails plus standardisés, sans demander aux utilisateurs de changer de comportement. C’est ambitieux. C’est aussi la seule manière de viser l’échelle, surtout dans des marchés où le temps et le coût d’apprentissage comptent autant que la technologie.
Une couche 2 tournée vers la conformité
ADI Foundation présente ADI Chain comme une layer 2 conçue pour les stablecoins et la tokenisation d’actifs du monde réel, avec une obsession assumée : la compatibilité réglementaire. La fondation se décrit comme un point d’entrée institutionnel, pensé pour les gouvernements et les régulateurs, et adossé à Sirius International Holding, la branche digitale d’IHC.
Ce positionnement tranche avec la course classique à la vitesse. Ici, le discours insiste sur des cadres “purpose-built”. En clair : identité, paiements, registres, et tout ce qui exige des contrôles, des règles, et une traçabilité qui ne fait pas peur aux institutions.
L’objectif affiché, lui, est presque provocateur : amener un milliard de personnes “onchain” d’ici 2030. Un chiffre rond, donc marketing. Mais il donne la direction : ADI vise des canaux de distribution déjà massifs, et M Pesa est un candidat logique.
Un MoU, et ensuite quoi ?
Le document annoncé est un MoU (memorandum of understanding). Il fixe une intention, pas un produit final. C’est important, parce que le marché confond vite “partenariat” et “intégration disponible demain matin”. À ce stade, on parle surtout d’alignement stratégique et de terrain d’expérimentation.
Sur le papier, les cas d’usage sont faciles à imaginer. ADI évoque déjà des chantiers autour des paiements internationaux, de l’identité numérique, ou encore d’applications liées à l’énergie dans des marchés émergents. Ces briques collent bien à la logique d’un réseau mobile money, qui sait gérer des volumes, des petits montants, et une relation utilisateur au quotidien.
La vraie question sera l’exécution. Qui porte le risque de conformité locale ? Comment on gère les litiges, les erreurs, les fraudes, et l’assistance client quand une couche “crypto” se glisse sous le capot ? Et surtout, quel est le bénéfice perceptible pour l’utilisateur final, au-delà du mot blockchain ?
L’effet d’entraînement des partenaires institutionnels
Cette annonce ne tombe pas dans le vide. Le 16 décembre 2025, Mastercard a communiqué sur des alliances stratégiques dans la région, dont une avec l’ADI Foundation, autour du règlement en stablecoins et de la tokenisation. Cela place ADI dans une trajectoire “paiements + conformité”, plutôt que dans la culture du “move fast and break things”.
Deux jours plus tard, une communication diffusée via Reuters mentionne une collaboration annoncée avec BlackRock, Mastercard et Franklin Templeton. Le message est limpide : les acteurs institutionnels veulent des infrastructures où la gouvernance, les règles et la distribution peuvent être discutées sans créer de zone grise permanente.
C’est là que le lien avec M Pesa devient intéressant. Une L2 “institutionnelle” sans accès aux utilisateurs ressemble à une autoroute sans bretelles. À l’inverse, un réseau de mobile money sans nouvelles briques numériques finit par plafonner. Le MoU peut servir de pont entre ces deux limites, à condition de livrer vite, et de livrer simple.
